• Brume

     

     

     

     La brume avait envahi le village des hûles, une brume dense, froide, légèrement bleutée.

    Rares étaient ceux qui avaient osé s’aventurer à l’extérieur des maisons : Gramech pour ramener le bétail en pâture: vaches, moutons, chèvres et quelques chevaux de trait, Archos qui devait chaque jour passer au moins une fois par la porte d'Est et revenir par celle de l’Ouest, s’il voulait continuer à percevoir et interpréter les variations et les nuances dans la lumière du soleil.

    Personne n’était vraiment inquiet et aucun des villageois n’en voulait à cette brume pacifique.

    Certainement pas les enfants qui en profitaient pour échapper à tout contrôle et s’amuser dans les lieux auxquels d’ordinaire ils n’avaient pas accès.

    Les granges regorgeaient de blé, orge, seigle, maïs. La provision de lait caillé et de fromage permettrait de tenir au moins trois semaines et la citerne d’eau avaient été remplie par les averses récentes et abondantes.

    Si les bêtes venaient à être perturbées par l’obscurité quasi permanente, on utiliserait les cailloux de lumière rechargée à plein par un été très ensoleillé, et tenu à l’abri, les uns contre les autres, dans les caves.

    Cette myriade d’infimes gouttelettes, en suspension dans l’espace durant une aussi longue période, avait quelque chose d’étrange mais chacun dans le village avait participé à sa mesure aux récentes récoltes, suivies des vendanges, puis des travaux de conservation et de transformation des denrées. Aussi, les hûliens de tout sexe et de tout âge, épuisés par cette période de travaux intenses goutaient ce repos forcé avec bonheur.

    C’est certainement pour cette raison que lorsque Ellaryana, passant devant la maison où logeait Asselpa, vit la brume presque liquide se déverser de la bouche de Tamel endormi et se répandre sur le village, c’est certainement pour cette raison qu'Ellaryana resta muette sur ces faits comme à propos du visage de l'enfant, rouge comme un volcan.

    ...

    A quelques volées de flèches, attentifs à ne pas s'égarer d'un chemin qui semblait les guider à travers la brume, de la chair, du fer et des âmes rugueuses emportaient au loin leurs germes de larmes.

     

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