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    27- Agnel

     

    Il faisait encore nuit. Pourtant, cette nuit voyait Tamel et Damouce s’éveiller comme si le temps du sommeil avait été totalement consommé.

    Réfi, grand dormeur, Réfi qui aimait à rester sur l’herbe sèche, le nez en l’air, des heures entières à demi dans le monde des rêves, longtemps après l’apparition du soleil, Réfi ne se trouvait plus à leurs côtés.

    Ils eurent beau l’appeler en tous sens, aucune réponse ne leur revint.

    D’ailleurs le silence autour d’eux était absolu. Aucun oiseau, aucun animal terrestre ne manifestait sa présence. La nature entière semblait suspendre sa respiration dans l’attente d’un événement d’importance.

    Les deux enfants eux-mêmes en firent de même contenant au mieux leur souffle.

    Soudain, une lueur apparut qui leur rappela les circonstances particulières de l’arrivée parmi eux de Réfi.

    Une autre suivit.

    Bientôt, le ciel tout entier se trouva illuminé de courbes gorgées de clarté dont l’extrémité coupait la ligne d’horizon, vers l’Est, en des milliers de points.

    A la vue de ces prodiges, de toutes parts, des hommes et des femmes accoururent.

    Bientôt une foule se tenait face à la direction d’où était venue la lumière.

    Les feux venus du ciel cessèrent.

    L’aube s’annonçait et, de cette lueur qui enflait au loin, l’un après l’autre des êtres semblables à des hommes, mais portant sur leurs épaules de grandes ailes blanches, apparurent.

    Sans qu’un seul mot soit échangé, chaque être s’approchant de la foule, pris par la main une de celles qui se trouvaient là, puis s’en alla en sa compagnie, comme pour une promenade.
    Aucun des compagnons de ces femmes enlevées sans violence ne parvenait à réagir. Tous semblaient pétrifiés par l'audace des visiteurs et leur tranquille assurance.

    Vivement, Tamel pris la main de Damouce. Il la tint dans la sienne jusqu’à ce que tous les êtres venus du ciel aient disparu.

    C’est alors que, sans qu’ils l’aient vu s’approcher d’eux, Refi fut à nouveau à près d’eux.

    Il semblait terrorisé.

    -         Qu’as tu donc Nats ? (Damouce préférait ce nom d’une seule syllabe) Cela ne va pas ? Tu es tout pâle.

    -         Vous devez m’aider. Il ne faut pas qu’ils me voient. Il ne faut surtout pas !

    -         Mais que pouvons nous faire pour cela ?

    -         Me manger !

    -         Mais voyons Refi, je te trouve déjà assez aboli comme cela aujourd’hui !

    -         C’est très sérieux. Et ne vous inquiétez pas pour moi. Ce ne sera que temporaire. Ne cherchez pas à comprendre, il n’y a pas d’autre solution. Mangez-moi !

    Aussitôt, devant Tamel et Damouce, à la place de leur ami, un beau rôti en sauce apparut qui les engagea, d’une voix étouffée, à se mettre à table et à le consommer.

    Il fallut une heure aux deux enfants pour faire disparaître ce diable de Refi.

    Lorsque ce fut fait Tamel et Damouce entendirent simultanément la même voix, plus lointaine que jamais, prononcer distinctement « Merci ! »

    Ce fut la dernière parole de leur étrange ami, avant longtemps.

     


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