• LEGNA

     

    Tamel était en retard.

    Son échappée dans le bourg, au fong de la vallée avait duré bien plus longtemps que prévu.

    L’enfant avait laissé ses pas l’égarer à la suite de divers personnages dont la lumière l’avait touché.

    Un grand vieillard sec et droit dont l’allure générale était celle d’un honorable bourgeois alors même que la pauvreté de ses habits, percés de toutes parts, mais sans tache, aurait du lui faire baisser la tête. Tamel et lui n’échangèrent qu’un seul regard, mais ce fut comme s’ils avaient conversé des heures durant, au coin d’une table, sur une terrasse au soleil, devant un verre d’eau fraîche de la montagne.

    Une demoiselle incroyablement belle en la partie gauche de son corps et dont l’œil et le pli à la commissure des lèvres, en son autre moitié, donna à Tamel, lorsque, se tournant vers l’enfant elle lui apparut, une impression de cruauté qui l’avait saisi.

    Une grosse dame attifée de vêtements chamarrés qui semblaient davantage avoir été collés sur son corps pièce par pièce qu’enfilés par les membres et la tête. Elle déambulait de façon incertaine, allant puis revenant sur ses pas en marmonnant ce qui sembla à l’enfant être des vers dont la musicalité et les rîmes furent douces à l’oreille de l’enfant.

    Et d’autres encore, moins remarquables au premier abord, mais dont un morceau d’être dépassait de la personne et donna, à celui qui les suivit ce jour-là, un aperçu, un paysage d’âme qui le captiva longtemps après chaque rencontre.

    Aussi, à présent Tamel se trouvait très en retard.

    Les rues avaient été désertées par les badauds et ceux qui en vivaient. Dans la petite ruelle que l’enfant remontait, hormis le personnage silencieux et lent qui le suivait depuis qu’il était entré dans la ville, Tamel était seul.

    Il n’en ressentait que plus cette présence qui paraissait boire sa trace et se mit à forcer sa marche. L’autre maintint l’écart avec le gamin sans pourtant donner l’impression de d’avoir allongé son pas.

    Tamel était presque parvenu à la porte de la muraille par laquelle il était arrivé au petit matin. Il regarda derrière lui afin de savoir s’il était toujours suivi…personne !

    C’est en se retournant qu’il vit, en travers du passage qui menait au dehors, l’inconnu, immobile en ses beaux habits clairs, qui lui barrait le passage.

    Sans réfléchir, baissant la tête, il fonça droit devant lui.

    Un pas, deux pas, trois … rien ne se produisit.

    Tamel, lorsqu’il leva les yeux, se trouva sur le début de la route qui menait à ses montagnes, manquant de trébucher sur une caisse abandonnée au milieu de la chaussée.

     

    Il lui fallut courir jusqu’à atteindre les premières collines avant que le feu qui lui traversait le corps en tous sens ait cessé de brûler le BOIS de son âme.


    Parce qu'il t'envie
    sans même pouvoir l'exprimer
    au sein des pensées sans chair qu'il occupe

    Parce que la douleur
    aussi incompréhensible et sauvage qu'elle paraisse
    lui révêle en même temps temps combien son absence est un exil

    Parce que son temps
    ne rencontre rien de ce qui illumine ou déchire ton visage
    l'ANGE voudrait savoir
                                     te haïr.

     
    « Le passage de l'horizon (...)Les éternels »

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  • Commentaires

    1
    annaj
    Jeudi 2 Février 2012 à 15:16

    comment faites-vous pour saisir tout ce qui me tourmente sans que je ne l'aie jamais exprimé...ce texte sur l'ange je pense qu'il est comme l' ombre  à mes pas! ;-)  comme si vous formuliez des  pensées qui trainent sous mes souliers. ..merci!

    2
    Aunryz Profil de Aunryz
    Jeudi 2 Février 2012 à 18:06

    C'est Tamel qui me raconte cela.

    Comme vous, comme d'autres, comme moi peut-être
    il partage la morsure des vents qui nous tourmentent
    et sont en même temps notre privilège.

    Certains astrologues disent que ce que leurs confrèrent nomment thème harmonieux
    n'est guère enviable
    et que par contre ce qui est vu comme traversé d'oppositions terribles et de dissonances
    est le lieu possible pour une belle symphonie

    Mais dans ce monde,
    rien ne se fait sans brûler son bois
    l'ange sait cela
    et voudrait pleurer d'en être privé

    LEGNA  ANGEL

     

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