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    Praulc avait vraiment changé.

    Plus personne ne reconnaissait l’horrible gamin toujours prêt à provoquer des désastres partout où il se trouvait, dès que l’occasion s’en présentait.

    Depuis plus d’une semaine, plus un chat enfermé dans une cave, plus de nœud dans les draps étendus à sécher au soleil, plus d’appel d’un coq, leurré par un soleil factice, réveillant tout le village des Hûles au milieu de la nuit.

    Chacun s’en réjouissait et particulièrement son père le doux Grenn qui n’était plus contraint chaque jour de frapper à la maison de la dernière victime de son fils pour présenter ses excuses et tenter d’obtenir un pardon.

    Damouce, elle, comme beaucoup d’autres bambins de son âge, était un peu triste. Une des principales causes de divertissement avait disparu du village où l’on riait à présent beaucoup moins.

    Quelques temps après ce que Grenn appelait une guérison, les mauvaises blagues et les petites catastrophes réapparurent cependant.

    Mais il fallut chercher un autre coupable, à l’heure des mauvais coups, Praulc était le plus souvent chez lui, à éplucher des légumes, couper du bois ou désherber le jardin.

    Moins habiles que lui, l’un après l’autre, les petits coupables, car ils étaient plusieurs, se firent prendre. Sans pour cela que ces mauvais coups ne cessent car l’un après l’autre tous les gamins du village commettaient à leur tour un nouveau méfait.

    Il fallut sévir et Anthelme se chargea de cette tache délicate.

    Tous les enfants de moins de sept ans – aucun des petits coupables n’avait atteint cette limite – furent assignés à résidence, lors de leurs temps libres, dans la grande salle du conseil où l'on mit à leur disposition divers travaux en rapport avec les habiletés et les forces de leurs âges.


    Un jour Tamel rencontra Praulc qui remplissait deux baquets d’eau claire à la fontaine. Celui-ci était d’un calme et d’une douceur impressionnante, l’eau semblait ralentir sa chute, son murmure s’atténuer et le baquet même diminuer son poids pour faciliter la tache à l’enfant.

    -         Tu sembles avoir mal à l’épaule, lui demanda Tamel.

    -        Un peu, mais pas tant que cela. En fait, je ne la sens presque plus. Mais je ne peux pas trop non plus la bouger.

    -         Ah bon ?

    -       En fait c’est un peu comme si elle ne faisait plus partie de moi, comme si quelqu’un d’autre l’habitait.

    -         Ce que tu me raconte là est troublant. Je pense à une phrase que me disait souvent Archos.

    -         Et que disait cette phrase ?

    -     Chasse un démon de ta maison et il viendra avec sept plus méchants en faire l’assaut !

    -         Où veux-tu en venir ?

    -         Ils ne sont pas venu te voir, ces sept démons !

    -         Qu’est-ce que cela veut dire ?

    -      Cela signifie que tu n’as pas vraiment chassé ton démon, il est quelque part en toi. Je suis même certain que c'est lui qui a pris possession de ton bras.

    -        Que dois-je faire ?

    -       Si j’en crois Archos, tu devrais tenter de négocier une paix durable avec celui qui est devenu l’ermite de ton bras.

    -      Je crois que je te comprends, même si c’est encore un peu flou dans ma tête. Merci de ton conseil Tamel.

     

    Le lendemain, la fontaine avait débordé sur la place, et, la nuit glaciale aidant, une magnifique patinoire était offerte à tous.

     


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